La France en guerre

L’entrée des grandes nations d’Europe occidentale dans une nouvelle guerre vingt ans seulement après la fin de la Grande Guerre a deux raisons fondamentales : l’agressivité de l’Allemagne nazie et son programme de conquête certes, mais aussi la passivité des démocraties, leur repli et leurs contradictions diplomatiques qui ont largement encouragé le dictateur. C’est à contre cœur que le Royaume-Uni puis la France déclarent la guerre à l’Allemagne. C’est avec une inquiétude et un pessimisme que tous les témoins ont souligné qu’Hitler assume ce nouvel état de fait.

Pourquoi la guerre ?

Chancelier de la République de Weimar le 30 janvier 1933, Hitler est devenu le Führer à la mort du Président Hindenbourg et a mis en place sans tarder une politique extérieure qui vise à déchirer page par page le traité de Versailles. En mars 1935, il rétablit le service militaire obligatoire, annonce la création de la Wehrmacht (armée de terre) et de la Luftwaffe (aviation). La France proteste. C’en est fini du désarmement de l’Allemagne. Un an plus tard il joue un nouveau coup de poker : les troupes allemandes entrent en Rhénanie. La démilitarisation de la Rhénanie était un point majeur du traité de Versailles et un fait que la France estimait nécessaire à sa sécurité. On sait aujourd’hui qu’Hitler avait donné l’ordre à ses troupes de reculer en protestant si l’armée française intervenait car elle était alors bien supérieure à l’armée allemande renaissante. L’état major français estima qu’il faudrait pour intervenir une mobilisation générale (ce que contestent les spécialistes) et le gouvernement jugea qu’on ne mobilise pas à quelques semaines des élections. Les Anglais estimèrent que l’Allemagne n’envahissait que… l’Allemagne et la France s’interdisait d’agir sans « la gouvernante anglaise ». Ce fut un drame : Hitler encouragé et confirmé du bien fondé de ses projets d’agression.

Il franchit sans obstacles les étapes suivantes : il annexa l’Autriche en mars 1938 puis exigea que revienne à l’Allemagne le territoire tchécoslovaque peuplé par la minorité allemande des « Sudètes ». La Tchécoslovaquie crut pouvoir compter sur ses puissants alliés : la France et le Royaume-Uni. Ce fut la conférence de Munich ; Daladier et Chamberlain abandonnèrent leur allié en croyant « sauver la paix ». Au printemps suivant Hitler finissait de dépecer la Tchécoslovaquie alors qu’il avait promis de n’en rien faire. Il a désormais une armée moderne ; il n’est plus diplomatiquement isolé mais allié à l’Italie. Il est persuadé que sa prochaine victime, la Pologne ne sera pas plus défendue que ne le furent les précédentes.

La démission progressive des démocraties

Aux Etats-Unis, le président Roosevelt élu en 1932 et réélu en 1936 se concentre essentiellement sur la politique économique et sociale du second New Deal visant à sortir le pays de la terrible dépression dans laquelle l’a plongée le krach de Wall Street en octobre 1929. Ce retour à l’isolationnisme est conforté par le fait que les Européens ne veulent plus régler leurs dettes de guerre depuis que les Etats-Unis ont accepté que l’Allemagne ne paie plus ses réparations. Un puissant mouvement d’opinion publique relayé par la presse affirme ne plus vouloir intervenir en Europe si la guerre y éclatait. Au Royaume-Uni Chamberlain conduit une politique dite d’« apaisement » c'est-à-dire de compréhension à l’égard de Hitler qui est supposé devoir se satisfaire des quelques revendications jugées justifiées qui sont alors les siennes. Chamberlain est convaincu d’avoir sauvé la paix à Munich alors qu’Edouard Daladier est bien plus réaliste… mais tout aussi peu déterminé à réagir.

La population française a été traumatisée par l’hécatombe de la Grande Guerre et est viscéralement pacifiste ; sa stratégie est fondamentalement défensive ; les Français sont profondément divisés et l’extrême droite est devenue très hostile à une guerre contre l’Allemagne supposée faire le jeu de Staline. Daladier est aussi conscient des faiblesses militaires de la France, même si contrairement aux affirmations pétainistes longtemps relayées par la droite, le Front populaire a entrepris une solide politique de réarmement.

Quand en mars 1939 Hitler envahit ce qui restait après Munich de la Tchécoslovaquie, Daladier et Chamberlain constatent enfin qu’Hitler ne tient jamais ses engagements, décident de ne plus le laisser faire et promettent à la Pologne leur soutien militaire en cas d’agression. Hitler réussit alors ce coup de maître diplomatique qu’est le pacte germano soviétique signé avec Staline le 23 août 1939. La Pologne en fera les frais : les deux dictateurs se la partagent dans un protocole secret. Le 1er septembre 1939 la Wehrmacht entre en Pologne. Deux jours plus tard le Royaume-Uni puis la France lui déclarent la guerre. A la différence de 1914, la France aborde la guerre en position de faiblesse diplomatique : elle ne bénéficie ni de l’alliance de revers russe, ni de la neutralité bienveillante de l’Italie.

Pourquoi

la « drôle de guerre » ?

L’expression est à comprendre comme une guerre étrange. Etrange puisque les deux belligérants ne se font pas la guerre, ou si peu. La Pologne est écrasée en trois semaines puis partagée et rayée de la carte. La France n’est pas intervenue : elle n’en avait ni l’intention, ni les moyens compte tenu de sa stratégie.

Stratégie qui ne manque pas de cohérence en apparence. La moitié de l’armée française est dans la ligne Maginot qui est une ligne de fortifications ultra moderne qui a coûté cher et qui traduit le pacifisme et la volonté défensive de la nation. L’autre moitié est en place le long de la frontière belge. Si l’Allemagne venait à violer la neutralité belge, les troupes françaises se porteraient en Belgique afin d’éviter l’invasion du territoire national et de rééditer 1914. Tardivement le plan a été modifié et les troupes devront se porter jusqu’aux Pays-Bas. A la charnière des deux groupes d’armée se trouvent le massif des Ardennes, peu défendu car considéré comme une défense naturelle ne se prêtant pas une offensive : Pétain l’a dit et répété : les chars ne peuvent pas traverser ce massif forestier.

Les faiblesses de la France sont à chercher dans son insuffisante aviation, dans son manque de DCA, dans le choix de la disposition de ses chars. Depuis le Front populaire les entreprises aéronautiques qui ont été nationalisées, ont été restructurées et la productivité s’est améliorée. Mais la France a trop peu d’avions ; ce qui ne peut être compensé par l’aviation britannique qui est alors sur le territoire britannique. La France a autant de chars que l’Allemagne et d’aussi bonne qualité ; mais les chars sont disposés en appui de l’infanterie (comme en 1918) et ne sont pas regroupés en divisons blindées : le colonel de Gaulle a prêché dans le désert en en réclamant la création. Il commandera l’une des deux divisions en cours de constitution en 1940.

On ne se bat donc pas et les troupes perdent de leur pugnacité en se persuadant au fil des mois que la guerre n’aura pas lieu. Au printemps les Alliés décident d’intervenir en Norvège pour couper la « route du fer », celle des importations allemandes. Hitler réagit vivement : c’est l’invasion du Danemark puis de la Norvège.

Pourquoi

l’invasion et la défaite ?

La stratégie allemande a été plusieurs fois remaniée au cours de l’hiver et finalement décidée depuis peu. Le plan audacieux qui a été retenu ne fait pas l’unanimité parmi les officiers qui le juge très risqué. Proposé par le général Manstein, il a été imposé par Hitler et va s’avérer d’une redoutable efficacité.

Le 10 mai 1940 la Wehrmacht envahit la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg. Très vite l’offensive est victorieuse ; les bombardements détruisent les infrastructures et terrorisent les populations. Le 13 mai, un violent bombardement anéantit le centre de Rotterdam ; les Pays Bas capitulent, puis la Belgique et le Luxembourg. Leurs gouvernements gagnent Londres.

Appliquant ses plans stratégiques, l’armée française s’est portée en Belgique et aux Pays Bas, allongeant démesurémentses lignes pendant trois jours, sans que le renseignement d’une concentration des blindés dans les Ardennes ne soit exploité.

Le 13 mai les panzer, divisions blindées allemandes attaquent dans les Ardennes. Très vite la Meuse est franchie, la faible défense française est enfoncée et la ruée stupéfiante se produit. L’état major consterné voit s’effondrer ses certitudes ; Gamelin est désemparé ; le général Georges ne cesse de répéter qu’il « faut colmater la brèche » mais n’en a pas les moyens. Rien n’a été prévu, rien n’est possible pour arrêter cette offensive de guerre éclair utilisant le couple terrifiant char-avion.      

 La bataille de France

En moins d’une semaine les Panzer sont dans la baie de Somme : l’armée française est piégée en Belgique entre les deux groupes d’armées allemandes. L’étau se resserre sur Dunkerque. Hitler ordonne aux Panzer de s’arrêter pendant deux jours, laissant aux troupes françaises et anglaises la possibilité inespérée de monter une opération d’évacuation. 340 000 hommes dont 120 000 Français traversent la Manche sous la protection de l’aviation anglaise, abandonnant toutes leurs armes. « On ne gagne pas la guerre avec des évacuations » bougonne Churchill qui depuis le 10 mai est le nouveau Premier Ministre de sa Majesté. Rien ne peut plus empêcher l’invasion de la France. Weygand qui a remplacé Gamelin limogé, trace une ligne sur le papier qui suit la Somme et l’Aisne. Mais on devra s’y battre à un contre deux avec une infériorité en artillerie bien plus grande encore. Le 5 juin débute la bataille de France alors que s’achève à peine celle du Nord. Le 10 juin l’Italie déclare la guerre à la France tandis les Panzer enfoncent la « ligne Weygand » et se ruent vers le sud et que les Stukas bombardent, mitraillent et terrorisent.

Les populations civiles encombrent les routes depuis des jours et des jours cédant à la panique qui les pousse vers le sud ; l’armée française est désorganisée ; les liaisons ne se font plus, les compagnies ne reçoivent plus d’ordre ; des officiers se replient : c’est la débâcle. Paris qui aurait pu être défendu est déclaré ville ouverte, puis toutes les villes de plus de 30 000 habitants.                                                                          

Le 14 juin les troupes allemandes entrent dans la capitale vidée des deux tiers de sa population. Le gouvernement s’est dispersé dans les châteaux de la Loire avant de gagner Bordeaux. En six semaines la France, la puissance française, la nation française s’est effondrée, anéantie. Un désastre absolu.                                                                  

Joël DROGLAND

AMD Panhard 178 N°16149 1940 

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Canon de 75

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Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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